RÉCIT Ile Sainte-Marie, face à l’Océan Indien dans lequel s’ébattent des baleines à bosse, nous prenons une semaine de congé au milieu de nos trois mois de bénévolat à Tamatave, première ville portuaire de Madagascar. L’occasion de revisiter les deux années qui ont précédé ce séjour et de s’étonner de vivre ce qui n’était au départ qu’une petite mélodie déposée dans nos cœurs, à peine audible !
Nous discernions qu’il y avait un fruit particulier à saisir pour notre famille. Nous sentions que la prochaine étape serait de solliciter un congé non payé de trois mois auprès de nos employeurs pour un temps de service dans un cadre chrétien. Nous étions alors solidement engagés professionnellement dans les domaines de la formation et de la Justice de Paix, à quelques mois d’une promotion et, bien entendu, nous n’avions pas les réponses aux nombreuses questions soulevées par cette conviction qui prenait place dans nos cœurs.
Un rêve et de nombreuses questions
Avec quelle organisation partir ? Quelle destination ? Comment rassembler le budget nécessaire ? A quel moment envisager ce séjour ? Comment obtenir l’accord des écoles des deux plus jeunes enfants ? Était-ce envisageable pour notre fille aînée qui démarrait des études d’infirmière ? Une seule certitude : puisque Dieu avait déposé cela dans nos cœurs, nous décidions de croire résolument et fermement que toutes ces questions trouveraient leurs réponses en temps voulu. Ce rêve s’inscrivait bel et bien dans des expériences antérieures que nous avions vécues, séparément, sur plusieurs continents, ainsi que dans le prolongement d’engagements réalisés en Suisse, mais l’échelle de ce projet nous défiait !
Une décision et les premières impressions
Nous avons choisi de demander des congés non payés. Cette action concrète, alors que nous ne savions pas encore avec quelle organisation, ni dans quelle partie du monde nous allions partir, a ouvert des portes et permis de trouver les réponses aux questions qui se posaient. De fil en aiguille, nous sommes entrés en contact avec les fondateurs et directeurs de l’ONG MIDEM (Mission Développement Madagascar), Déborah et Naina Rakotoarijao. Le soutien, l’intérêt et les encouragements témoignés, en particulier par la Commission Afrique et Moyen-Orient (CAMO) et par une personne du Groupe Mission de notre Église (Gospel Center Oron), ont été d’une aide précieuse.
Ainsi, nous avons atterri à Madagascar le 21 mai 2024, et à Tamatave le lendemain. Nous étions extrêmement heureux de vivre cette expérience et notre acclimatation s’est très bien passée. Nous avons été particulièrement bien accueillis par Déborah et Naïna, manifestant une bienveillance et une prévenance qui nous ont fortement touchés !

Nous avons immédiatement été impressionnés et profondément attristés par l’extrême dénuement d’une grande partie de la population, proche de la misère, même en ville. Nos enfants, Kevan et Sheyma, 7 et 10 ans, ne savaient pas bien que faire des émotions générées lorsque des enfants de leur âge s’approchaient pour mendier. Par chance, nous nous sommes rapidement intégrés à la base de MIDEM sur laquelle 300 élèves sont scolarisés et 150 sont nourris chaque jour. Ainsi, ils ont pu se faire de solides amitiés. Justine, notre fille aînée, a pu nous rejoindre pendant trois semaines et a servi dans les divers projets.
Les semaines se sont écoulées en alternant la découverte des nombreux domaines d’activités de MIDEM, nos engagements dans les projets de l’ONG, les trajets en tuk-tuk dans les embouteillages, l’école à la maison – moyennement appréciée par les enfants – et des temps forts d’amitiés fraternelles avec les membres de l’Église francophone.

Une autre culture et le travail de MIDEM
Nous tentons de comprendre comment l’on travaille à Madagascar, que ce soit la manière de gérer les ressources matérielles et temporelles ou de faire face aux constants aléas, en alternant entre frustration, colère face à la corruption omniprésente, étonnement et enthousiasme. Nous avions dès le départ le souci d’être utiles sans être une charge et nous faisons le constat qu’un séjour de trois mois est bien trop court ! Malgré cela, nous retirons énormément de joie et de reconnaissance pour tout ce que nous pouvons vivre, l’enrichissement extraordinaire né du partage, en particulier avec des personnes qui souhaitent voir les valeurs du Royaume se propager, transformant les vies et les communautés.
Notre plus grande source d’admiration restera très certainement le travail de l’ONG MIDEM et les valeurs qui le portent. Un engagement familial depuis presque 40 ans qui veut voir des communautés transformées par les valeurs du Royaume, en les rendant solides socialement et économiquement, afin de contribuer à l’éradication de la pauvreté. Dans une culture où le nom de Jésus peut se retrouver partout et sur toutes les lèvres, MIDEM choisit les actes plutôt que les paroles afin de témoigner dans toutes les sphères de la société des valeurs de bienveillance, d’empathie, de recherche de compromis, de droit à l’erreur, d’honnêteté, d’intégrité, tout en manifestant de bonnes compétences professionnelles. Ainsi, et au gré des inspirations déposées sur leurs cœurs, Naina et Déborah et les partenaires de MIDEM sont à l’origine d’une école, de cantines, de coopératives de pisciculteurs, d’élevages de poules pondeuses et de chair, de projets agronomes, de fabrication et commercialisation d’aliments pour animaux, de fabrication textile, d’un espace de co-working et d’une coopérative d’entreprises formatrices.

Arrivant au terme de notre séjour, nous appréhendons la séparation des liens qui se sont tissés et le retour à nos activités professionnelles, et nous allons laisser une partie de notre cœur à Madagascar ! Nous ne connaissons pas la suite mais nous souhaitons rester dans la disposition d’esprit qui est la nôtre depuis deux ans, à savoir être à l’écoute des projets que Dieu dépose dans nos cœurs, confiants qu’Il possède déjà les réponses à toutes nos questions. Nous rentrons remplis de reconnaissance pour ces extraordinaires pages de vie.
Evelyne et Sylvain Chollet
Tamatave, juillet 2024
Extrait du NEWS 2/24